La semaine dernière, nous avons discuté au Conseil national du projet de modification légale qui vise à faire primer les conventions collectives de travail de force obligatoire sur les salaires minimaux cantonaux.
Quel est le projet de société des partis bourgeois ? Est-ce que leur projet est d’appauvrir encore plus les travailleuses et les travailleurs précarisés ? Car c’est bien la conséquence d’une acceptation de ce projet. Les travailleuses et travailleurs précaires seront encore plus pauvres avec l’acceptation de ce projet.
Pour vous donner des exemples concrets, un employé genevois qui travaille dans la restauration, perdra 500 francs de salaire par mois. Une coiffeuse genevoise perdra jusqu’à 700 francs de salaire par mois.
A-t-on le droit de jouer au yoyo avec la vie des gens qui travaillent dans notre pays ?
Après l’acceptation des salaires minimaux dans certains cantons, ces personnes ont vu leur situation s’améliorer et ont peut-être par exemple changé d’appartement ou ont décidé de fonder une famille. Et aujourd’hui, avec cette décision, on va changer les règles et plonger ces personnes dans de grandes difficultés financières.
La majorité du Parlement a également décidé de s’assoir sur des principes importants de l’ordre juridique de notre pays, comme la répartition des compétences entre les cantons et la Confédération et le principe de légalité, qui sont pourtant garantis par notre Constitution. Lors de la consultation, les cantons ont d’ailleurs vivement et clairement critiqué ce projet.
A part le canton d’origine de Monsieur Erich Ettlin, mon collègue du Conseil des Etats qui est à l’origine de la motion, l’intégralité des cantons refusent cette modification. Les cantons relèvent l’ampleur de l’atteinte qu’elle porte à la démocratie et à l’autonomie des cantons à décider de leur politique sociale. La position des cantons montre clairement que ce projet de loi porte une attaque grave et sans précédent au fédéralisme.
Il faut encore rappeler que dans tous les cantons dans lesquels un salaire minimum a été mis en œuvre, c’est bien la population, qui a majoritairement voté en faveur d’initiatives cantonales. Les parlementaires sont nombreuses et nombreux à souligner lors de leurs prises de parole que le peuple est souverain. Ils ont pourtant remis en question l’un des fondements de notre démocratie.
Dans le canton de Neuchâtel, par exemple, les salaires minimaux ont été déterminés pour permettre aux salariés qui travaillent à plein temps de vivre décemment de leur salaire sans devoir recourir à l’aide sociale. Il s’agit d’une réelle politique sociale de lutte contre la pauvreté, de compétence cantonale. Cette manière de procéder a été validée et confirmée par le Tribunal fédéral, à la suite d’un recours perdu par les associations patronales. Les cantons sont donc bien souverains pour décider eux-mêmes de la mise en œuvre d’un salaire minimum.
Le projet part désormais au Conseil des Etats pour traitement. Il reste ainsi un espoir que les parlementaires censés représenter les intérêts de leur canton entendent le rejet total de leur Gouvernement respectif.
Nous combattrons de toutes nos forces ce projet antisocial et antidémocratique. Les gens qui travaillent doivent pouvoir vivre de leur salaire. Soyons prêts à descendre dans la rue pour faire signer le référendum !
Emmanuel Amoos, conseiller national