Lors de la dernière session, la majorité bourgeoise du Conseil national a décidé de lancer une attaque sans précédent contre les droits des de travailleuses et des travailleurs. Comme membre de la Commission de l’économie, j’ai pu exprimer au plenum tout le mal que je pense de ce projet.
Il s’agit du projet de mise en œuvre de l’initiative Burkart, élaboré par la commission de l’économie, qui a pour titre « Assouplir les conditions encadrant le télétravail ».
Ce projet de loi menace clairement la vie de famille, les weekends et la santé de trois millions de personnes.
Imaginez-vous…, devoir être disponible pour votre patron.ne… de 6h du matin jusqu’à 23h.
Imaginez-vous…, qu’après cette journée sans fin, terminée à 23h, votre patron.ne puisse exiger de vous, d’être à nouveau disponible le lendemain matin à 8h, avec seulement 9h de repos et de coupure entre les 2 journées.
Imaginez-vous…, que même durant ce temps de repos de 9h, votre patron.ne puisse exiger que vous interveniez pour régler une urgence.
Imaginez-vous…, que votre patron.ne puisse vous forcer à travailler 9 dimanches par an, même si votre contrat ne le spécifie pas.
Ce n’est pas une fiction, ce n’est pas non plus un mauvais rêve, mais c’est bien ce que veut imposer la majorité bourgeoise de ce Parlement aux 3 millions de personnes qui travaillent pourtant déjà très dur dans notre pays.
Car contrairement à ce que le titre de l’initiative pourrait laisser entendre, ce projet n’impacterait pas uniquement les personnes qui font du télétravail, mais bien l’intégralité des personnes qui travaillent.
Le Parlement a en effet suivi la proposition du Conseil fédéral d’étendre massivement le champ d’application. Cette déréglementation ne serait plus que conditionnée aux personnes qui peuvent fixer elles-mêmes une part significative de leurs horaires de travail. Mais que signifie ces termes, que signifient « une part significative » ?
Le Conseil fédéral y répond dans son rapport : il suffit que l’employeur accorde une heure de flexibilité le matin et une heure le soir et qu’une partie minime du travail puisse être effectuée en dehors de l’entreprise pour que ce projet de loi soit applicable.
Dans les faits, le projet invite carrément les employeurs à organiser le travail de manière qu’une partie, même minime, du travail soit effectuée en dehors de l’entreprise. Techniquement, il devrait désormais être possible dans presque tous les secteurs d’activité, d’effectuer certains travaux administratifs en dehors du bureau. Cela permettrait alors de contourner les dispositions « normales » de la loi sur le travail relatives au temps de travail. Ce projet dépasse donc très clairement le cadre du télétravail et concerne presque tous les trois millions de salariés qui sont aujourd’hui soumis à la loi sur le travail.
Les risques pour la santé liés à une surcharge de travail sont énormes. L’enquête suisse sur la santé, publiée par l’Office fédéral de la statistique, a déjà montré que l’augmentation du stress sur le lieu de travail, en particulier en lien avec la confusion entre travail, temps libre et le non-respect du repos nocturne, a entraîné une forte hausse des maladies liées au stress telles que le burnout.
Si le projet n’est pas jeté aux oubliettes par le Conseil des Etats, je m’engagerai pour lancer le referendum. Le PS et les syndicats s’opposeront à tout affaiblissement du droit du travail au détriment des employées et employés. La protection de la santé est l’objectif prioritaire de la loi sur le travail, et cela doit le rester. La protection devrait, contrairement à ce projet, être renforcée.
Emmanuel Amoos, conseiller national