A quand une politique familiale digne de ce nom en Suisse ?

Le besoin d’accueil extrafamilial a augmenté sensiblement ces dernières années. La présence plus importante des mères sur le marché de l’emploi, les changements dans la famille, la diminution du temps de garde par les grands-parents, en sont les causes principales.

Pour répondre à cette demande, l’offre actuelle en matière d’accueil extra-familial est insuffisante et l’état se doit d’apporter des réponses adéquates à cette problématique qui touche la sphère économique, familiale, de santé publique et de droit et de bien-être de l’enfant. Les propositions de la gauche pour une politique familiale plus généreuse n’aboutissent que très rarement et que partiellement par rapport aux projets initiaux. Les obstacles sont le financement et une certaine vision de la famille, à savoir l’idéal de la mère au foyer.

Pour ce qui est de l’obstacle financier, voyons comment la responsabilité du financement et de l’organisation entre communes et cantons est répartie aujourd’hui. Dans certains cantons alémaniques, le financement incombe entièrement aux communes. En Valais, le coût des structures de la petite enfance est partagé entre canton, communes et parents. Le canton charge les communes d’évaluer les besoins d’accueil sur son territoire et de mettre en place les structures nécessaires, sans injonction légale claire d’assurer une place d’accueil par enfant. C’est donc à chaque commune d’interpréter cette exigence cantonale avec pour conséquence une disparité de l’offre et de la charge supportée par les parents. Ces décisions dépendent en effet des capacités budgétaires des communes et de la sensibilité politique des élu·es aux exécutifs et aux législatifs communaux.

Aussi et afin d’éliminer les obstacles précités, la politique familiale devrait être réfléchie et décidée de manière globale, uniformisée par des lois fédérales contraignantes. A mon sens, trois pistes de réponses sont intéressantes à explorer: un congé parental généreux de 18 mois, un relai par les structures d’accueil entre 18 mois et 4 ans et des horaires continus durant la scolarité obligatoire. Le congé parental de 18 mois serait à répartir obligatoirement entre les deux parents, à l’instar du système que connaissent les pays nordiques comme la Suède par exemple. La présence des parents durant cette période de vie est importante. De nombreuses études sur le développement de l’enfant montrent qu’un lien d’attachement sécure et des interactions de qualité avec le parent ou le care-giver sont prédictives d’un bon développement de l’enfant. De plus, devenir parent engendre des remaniements psychiques qui passent par une crise identitaire autant pour le père que pour la mère. Permettre aux parents de vivre sereinement cette étape de vie, c’est prévenir des risques de dépression prénatale ou de burnout parental.

Après le congé parental, les crèches pourraient prendre les relais jusqu’à l’entrée à l’école qui assurerait la suite de la prise en charge avec l’horaire continu. Des économies pourraient être réalisées dans les structures actuelles de 0 à 18 mois et celles de l’UAPE.

Enfin, tout le monde y gagnerait. L’économie qui bénéficierait des compétences des mères à un pourcentage plus élevé, l’égalité hommes-femmes assurée par un partage plus équilibré des tâches, les fonds de l’AVS qui bénéficierait de davantage d’actifs qui cotisent, les parents et les enfants.

 

Il faut tout un village pour élever un enfant. (Proverbe africain)

Agerdita Bogiqi, conseillère municipale, Monthey