Une grande question agite la partie germanophone du canton : celle de la cohésion cantonale, sur fond de calculs arithmétiques et de représentation au sein des différentes institutions.

À l’heure actuelle, rappelons que la seule garantie qui existe, c’est le fait que sur les cinq conseillers d’État, un membre doit être élu dans chaque région (haut — centre — bas). Règle qui n’a d’ailleurs jamais eu à s’appliquer, le Haut-Valais étant représenté par deux élus (40 % des sièges) depuis la nuit des temps.

L’actuel projet de Constitution ne change au final que peu de choses, dans les faits… On connaît la force de mobilisation du Haut-Valais dans le cadre électoral — aucun reproche en la matière — ils savent soutenir les candidatures issues de la minorité linguistique et culturelle… et ce fonctionnement leur a toujours souri… là encore, peu de risque que la situation n’évolue.

Mais ce qui manque aujourd’hui, c’est un rappel de ce sur quoi se fonde réellement la cohésion cantonale ! La cohésion cantonale ne se décrète pas comme acquise si un siège sur deux est garanti au Conseil des États pour la partie germanophone ou s’il le Haut-Valais compte 29, 32 ou 34 sièges sur les 130 que compte le Grand Conseil.

Entendre qu’il s’agit d’une déclaration de guerre, c’est manquer le coche sur ce qui sépare les deux principales cultures cantonales, mais c’est surtout faire fi de tout ce qui nous unit !

C’est vrai, nous venons des régions culturellement et linguistiquement différentes ; personne ne le niera. Nous avons grandi en écoutant des chansons différentes, avec des références télévisuelles qui peuvent se retrouver aux antipodes, nos auteurs et autrices favoris ne portent pas les mêmes noms…

Et pourtant nous vivons toutes et tous ensemble… et — soyons honnêtes — globalement nous vivons très bien ensemble ! Nous aimons nos montagnes — qu’elle s’appelle Matterhorn ou Cervin ; nous aimons le Turtmann tout autant que le Bagnes 4 lorsqu’il s’agit d’organiser une raclette, sans parler du Fendant qui l’accompagne, en provenance directe de Leuk ou de Fully ; notre culture vitivinicole est la même, que le même cépage s’appelle Heida ou Païen ; et que nos chèvres aient une « tête noire » ou que nos vaches soient de la race d’Hérens, notre patrimoine est bel et bien commun !

Du reste, la nouvelle Constitution n’attend pas très longtemps pour aborder cette question essentielle… L’article 6 rappelle que le français et l’allemand sont les langues officielles du Canton et qu’elles ont la même valeur juridique. Quant à l’article 8, il aborde de manière frontale la question de la cohésion cantonale : « Le Canton veille à son unité et à sa diversité. Il tient compte de ses particularités linguistiques, culturelles, géographiques et régionales. »

Par ailleurs, le projet de Constitution prévoit même que « si la représentation des régions linguistiques au sein de la députation au Conseil des États est durablement déséquilibrée, la loi peut prévoir une mesure limitée dans le temps visant à corriger ce déséquilibre ». La même notion a été introduite pour la représentation des genres.

Bref, la cohésion cantonale doit se vivre au quotidien, s’exercer par un respect mutuel, se renforcer par une meilleure compréhension de l’autre… Mais une chose est sûre, elle ne se mesure pas à l’aune d’un simple calcul arithmétique.

Ah oui j’oubliais… Savez-vous combien de fois la Constitution actuellement en vigueur et datant de 1907 fait référence à la cohésion cantonale ? Je vous laisse deviner, mais je pense que tout le monde a compris l’idée…

 

Gaël Bourgeois, Constituant