Né en 1948 à Porrentruy, Philippe Frossard vit en Valais depuis 1972.

Celui qui se définit comme citoyen du monde est aujourd’hui un retraité actif. Après une licence en psychologie de l’éducation et expérimentale / épistémologie, il fut d’abord collaborateur du conseiller pédagogique du chef de département de l’instruction publique, puis conseiller en orientation professionnelle durant vingt-deux ans et animateur en réintégration professionnelle les six années suivantes, avant de mettre en place et diriger les offices régionaux de placement (ORP) durant presque quatorze ans.

Une fois à la retraite, le camarade bien connu au sein du Parti socialiste du Valais romand a participé activement à la rédaction de la revue Panorama, spécialisée dans les domaines de l’orientation, de la formation professionnelle et du marché du travail.

Aujourd’hui, Philippe Frossard est membre du bureau des tables du Rhône, et participe au groupe « insertion » de la FIPED (Fabrique internationale des pratiques entrepreneuriales durables).

La motivation de rédiger un ouvrage consacré aux victimes de l’oppression et de la torture remonte à son enfance. Confronté dès les années cinquante aux récits d’exemples concrets d’ignominie dans le monde entier, heurté par les souffrances subies par tant d’oppressés, c’est un témoignage bouleversant qui en 2021, lui a permis de finaliser le manuscrit encore à l’état de brouillon.

Dans les années cinquante, un curé insomniaque déambulait dans sa cure, hanté par ce qu’il avait vécu au camp de Dachau. Corps empilés, morts sous les sévices, le typhus et fosses communes creusées par les prisonniers…

Un cousin alsacien de son père frôlait les murs en pleine ville de Delémont. Le régime de terreur imposé par l’armée française lors de la guerre d’Algérie laissait des traces même parmi ses soldats…

Les images de la guerre du Vietnam circulaient à l’université, les étudiant·es d’alors ne les oublieront jamais. Un prisonnier Viêt-Cong abattu en pleine rue d’une balle dans la tête par un officier de sang-froid, une fillette nue et le corps brûlé fuyant un bombardement au napalm, et 15 millions de tonnes de bombes et d’explosifs déversés par les bombardiers B-52 des Américains…

Le coup d’état d’Augusto Pinochet en 1973 annonçait la fin du gouvernement de Salvador Allende. Suivirent d’autres coups d’état en Amérique du Sud, forçant des milliers de personnes à l’exil.

Comme le dit Philippe Frossard, « des circonstances diverses m’ont alors mis en relation personnelle avec plusieurs refugiés chiliens et uruguayens. » Et survient ce témoignage d’une amie d’origine jurassienne, dont le mari chilien, Hernan Becerra Madrid, décède en 2021. Elle raconte son parcours de torturé, de réfugié à la Chaux-de-fonds, puis son retour au pays natal. Quarante-huit années consacrées à témoigner des souffrances des suppliciés, des violences de la police politique chilienne, à dénoncer l’impunité des tortionnaires, à chercher des appuis pour réhabiliter et dédommager les victimes non exécutées. A la veille de sa mort, il apprendra que sa plainte civile a abouti pour un dédommagement. Il n’aura pas eu connaissance de la condamnation pénale de ses tortionnaires à dix ans de détention ferme. Cinquante ans après le coup d’état !

« Là où hurlent les suppliciés » (éditions Jets d’Encre), ne prétend pas écrire l’Histoire. Sous la forme de dialogues, il reprend le cours de l’histoire et trace, tout au long des pages, comme un fil rouge qui nous conduit inexorablement à l’actualité dramatique que nous connaissons de nos jours. Partout, et toujours, la torture est l’œuvre du totalitarisme, sous couvert de la raison d’état. « L’histoire montre que la torture se pratique partout dans le monde, sans distinction de nation, de culture, de race, ni d’idéologie politique ou religieuse ». Philippe Frossard l’affirme, « l’Occident porte depuis l’ère des colonisations une lourde responsabilité dans l’organisation de répressions populaires et dans le développement massif de l’usage de la torture… et cela tout particulièrement au XXème et XXIème siècle ! »

Aucune victime du régime de Pinochet n’oubliera ce qu’on lui a fait subir. Cinquante ans après, d’autres victimes croupissent dans des prisons malfamées, insalubres, où résonnent les hurlements des suppliciés. Aucune raison d’état ne justifiera jamais ces pratiques abominables, ni au fin fond de l’Oural, ni dans les cachots israéliens, ni dans les camps de Guantanamo ou les geôles de Pékin. Cette liste noire n’est de loin pas exhaustive !

L’actualité nous le démontre une fois de plus. Les guerres qui embrasent le monde résultent de conflits jamais réglés, de souffrances écrasées par le silence, et certainement des hurlements de suppliciés par des tortionnaires issus de tous les camps.

« Il demeure encore et toujours essentiel de renforcer les mécanismes de protection des droits de l’Homme, de veiller à ce que les auteurs de torture soient poursuivis en justice et de soutenir les victimes dans leur lutte pour la justice et la réparation.

La lutte contre la torture est devenue une devoir moral permanent … pour tous les citoyens de toutes les nations ! »

 

Barbara Lanthemann, rédactrice en cheffe