Et non, on ne parle pas de la trouvaille d’un membre de l’équipe rouge lors d’une épreuve de Koh-Lanta mais bien de l’impunité totale d’une puissance occidentale qui commet depuis maintenant un an un génocide dans un des territoires les plus densément peuplés du monde.
Non content d’épurer une partie de la population civile d’une prison à ciel ouvert, l’entité sioniste a décidé unilatéralement de bombarder et d’envahir l’état souverain libanais. Comme c’était déjà le cas lors du pilonnage de Gaza, Israël prétend combattre le terrorisme pour justifier ces massacres abominables. En réalité, il s’agit une fois de plus d’une démonstration de force d’une puissance coloniale. Parce que le nœud du problème de cette guerre asymétrique qui dure depuis des décennies est bien le désir de colonisation et d’expansion. Le tout sous couvert de nationalisme ethnique et d’exclusivisme religieux. Le revers de ce point central est l’oubli du droit à l’autodétermination des Palestiniens, figurant pourtant dans la charte des Nations unies. Durant des années, le gouvernement de Netanyahu, tout comme une partie de la société israélienne, a considéré la « question palestinienne », comme faisant partie du passé. A grand coup de décret favorisant la colonisation illégale dans les territoires occupés, ils ont pensé régler la problématique en annihilant à petit feu la possibilité d’un état palestinien. Il leur été demandé d’accepter leur sort de peuple vaincu en disparaissant dans l’oubli.
Une autre problématique est que le droit international est jeté aux ordures depuis bien longtemps. A partir des attentats du 11 septembre 2001, nous avons assisté à un changement de grille de lecture de beaucoup de conflits. Quand certaines puissances prétendent combattre le terrorisme, tout ou presque est accepté. Massacres de civils, détention arbitraire et torture pour ne citer que ces crimes. Lorsqu’un pays, et surtout une puissance occidentale, nomme un ennemi en tant que terroriste, il se place en défenseur du bien contre le mal absolu pour justifier les pires atrocités. Dès lors, pourquoi se priver puisqu’une forme de tolérance de la part de la communauté internationale est acceptée ? Et plus on décortique les conflits, plus on constate ce changement de paradigme qui incite à se prétendre au-dessus de toutes lois et de toute morale au prétexte de défendre un modèle libre et démocratique. Force est de constater qu’Israël n’y échappe pas. L’Organisation de libération de la Palestine (OLP) a été pendant de nombreuses années considérées comme terroristes, soit l’ennemi ultime à abattre avant d’être légitimée et que des pourparlers officiels soient menés. Le Hamas, qui a gagné les dernières élections démocratiques à Gaza rappelons-le, a subi en permanence cette tentative de dépolitisation et de diabolisation de son organisation. En agissant ainsi, Israël peut légitimer absolument tout. En déshumanisant également toute la population, elle accentue encore plus la violence, déjà inouïe, sur les Palestiniens. Selon l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’homme, plus de 70 000 tonnes de bombes auraient été larguées sur la bande de Gaza par l’armée israélienne entre le 7 octobre et le 24 avril, dépassant de loin celles larguées sur les villes de Dresden, Hambourg, Londres, et Hiroshima pendant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, environ 85% des bâtiments sont détruits alors que l’hiver approche à grand pas. Selon certains experts qui comptabilisent les disparus et les morts direct ou indirect de cette guerre, près de 200’000 personnes auraient péri à Gaza depuis octobre 2023. Cela représenterait environ 10% de la population. Comment ne pas être révolté en lisant ceci ? Le gouvernement d’extrême droite israélienne a menti à tout le monde. Prétextant ramener les otages – dont il n’en avait cure– et démanteler le Hamas, l’état hébreu a en fait détruit purement et simplement la Bande de Gaza. L’ancien officier de l’Armée française Guillaume Ancel résumait la situation ainsi : « Quand on utilise pour moitié des munitions aériennes, des bombes d’une tonne, ce ne sont pas des attaques ciblées. On sait dès le départ qu’on va faire 90 % de victimes collatérales. C’est un choix ». A titre de comparaison macabre, les crimes de guerre commis par le Hamas le 7 octobre 2023 ont tué environ deux tiers de civil, le reste étant des soldats ou de forces de sécurité. Ce choix dont parlait cet « expert de la guerre » signifiait de faire régner la terreur sur une population civile en espérant qu’elle fuit. Il n’aura pas fallu longtemps d’ailleurs pour que certains extrémistes revendiquent ce bout de terre pour continuer leur politique expansionniste et coloniale.
S’agissant du Liban, l’entité sioniste a lancé 85’000 kg de bombes sur Beyrouth en détruisant six immeubles pour viser un seul homme. Cette attaque a tué une centaine de personnes. Le droit international est balayé, piétiné, massacré. Aujourd’hui, un état peut décider de qui il veut tuer en commettant des assassinats violents tuant de nombreux innocents. Où se trouve la limite de cette dangereuse escalade ? Si aujourd’hui un état décidait de lancer une bombe sur la capitale d’un autre état pour tuer un individu qu’elle considère comme le mal, est-ce qu’il n’y aurait pas une réaction unanime de condamnation et de sanctions de la communauté internationale ? Pourquoi quand Israël enchaine des crimes de guerre simultanément sur plusieurs pays différents, personne ou presque ne s’offusque ? On assiste de plus en plus à une faillite de la morale et de l’éthique qui avaient été les piliers centraux de la charte de l’ONU au sortir de la 2ème guerre mondiale. Les pays occidentaux renient chaque jour un peu plus leurs propres principes, ils se terrent dans une vision totalement colonialiste en reprenant la rhétorique d’un état aux pratiques terroristes. Et les médias reprennent en boucle la sémantique de ce pays voyou. Qu’on se lise, Israël n’a pas le monopole de l’état paria dans le monde, et de loin pas. Mais c’est probablement l’unique pays qui invoque la démocratie et la lutte contre le barbarisme pour aller bombarder des écoles et des hôpitaux ou « juste » assassiner des journalistes.
Comment ne pas s’étonner pour ne pas dire s’indigner de voir quotidiennement des porte-parole de l’armée israélienne venir en direct répandre la propagande inhumaine aux relents fascisants ? Et gare à celui ou celle qui oserait remettre en doute les propos, l’ignoble chantage à l’antisémitisme ne se cacherait pas très loin. Car non, critiquer la politique coloniale et raciste, d’un état épinglé à maintes reprises pour ses pratiques d’apartheid ne peut être assimilé à de l’antisémitisme. Cet argument perfide nuit profondément aux réelles discriminations- perpétrées bien souvent par des extrémistes de droite- dont les personnes de confessions juives sont victimes. On peut citer comme preuve Netanyahu allant draguer les gouvernements européens les plus à droite de l’échiquier politique aux relents pourtant bien antisémites. Qu’importe si en Hongrie, en Pologne ou en Autriche on tient des propos révisionnistes voire négationnistes, l’important c’est que les partis fascisants soutiennent Israël. En France également, lors de la manifestation contre l’antisémitisme l’an dernier, des membres du Groupe union défense (GUD), défilaient aux côtés d’entités telles que la Ligue de défense juive (LDJ) et le Bétar. Le gouvernement israélien ne fait en réalité que perpétuer cette tradition remontant au début du sionisme qui consiste à trouver dans les antisémites européens des alliés à leur projet en se maintenant à la faveur de la « convergence coloniale ».
Aujourd’hui, partout en Europe et même en Suisse, nous faisons preuve d’une complaisance infinie envers l’état d’Israël. Lorsque ce dernier décide de faire exploser des milliers d’appareils électroniques simultanément en blessant ou tuant des milliers de personnes dont de nombreux civils, il ne peut être qualifié autrement qu’en tant qu’entité terroriste. Quand même l’ex-chef de la CIA Leon Panetta qualifie l’explosion des bipeurs du Hezbollah comme une « forme de terrorisme », nous pouvons légitimement penser qu’Israël est un régime de terreur. Malgré cela, notre pays continue de soutenir aveuglément l’état sioniste en s’alignant en permanence sur les décisions coloniales et impérialistes. La non-reconnaissance de la Palestine dans les frontières de 1967 combinée à la décision de suspendre les vivres de l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) démontrent encore plus le basculement de notre gouvernement dans une lâcheté bien marquée de « droitisme » et surtout bien loin de la tradition humanitaire que la Suisse pouvait se targuer d’avoir. À une époque où la guerre contre le terrorisme a causé bien plus de victimes que le terrorisme lui-même, et où elle a engendré davantage de vocations terroristes qu’elle n’en a éliminées, il serait peut-être temps de changer de grille de lecture en refusant de suivre continuellement la ligne des puissances occidentales ayant dévasté les pays du Sud global. Il n’a fallu que quelques semaines à la Suisse pour imposer des sanctions contre la Russie en 2022, combien d’années et de centaines de milliers de morts faudra-t-il pour que notre pays agisse contre une puissance qui commet un génocide à la vue de tous ?
Yoann Bodrito, rédacteur en chef