Credit Suisse : l’irresponsable récupération politique de la droite

 

La session extraordinaire des Chambres fédérales s’est terminée sur un refus des crédits de garantie pour le rachat du Credit Suisse par UBS. Ce vote n’avait de toute manière qu’une portée que symbolique, tout le monde s’accordait là-dessus. Ça n’a pas empêché le camp bourgeois de crier à l’irresponsabilité de la gauche lorsque nous avons voté contre. Posons donc les faits et tâchons de comprendre ce qui s’est passé.

Pourquoi cette session extraordinaire ?

Le Conseil fédéral avait déjà engagé les crédits nécessaires au sauvetage de la banque. Le vote sur ceux-ci n’avait donc, avant même que les débats ne débutent, qu’une portée symbolique, a-t-on pu lire. Il s’agissait pour le Parlement de pouvoir s’exprimer publiquement sur l’affaire et d’éventuellement renforcer la législation bancaire, au moyen d’interventions parlementaires.

Quels étaient les objectifs du PS ?

Pour le PS, cette session était donc l’occasion de développer la règlementation bancaire pour la rendre plus efficace, afin que les contribuables n’aient plus à payer pour les échecs des managers des grandes banques. Plusieurs revendications étaient sur la table afin de réduire les risques futurs : limiter les bonus pour les grandes banques d’importance systémique, augmenter le taux minimum de fonds propres, ou encore séparer les activités des banques d’investissement et de dépôt.

Qu’est-ce qui a pu être (ou pas) atteint ?

Toutes les propositions contraignantes (plafonnement des bonus, augmentation des fonds propres, commission d’enquête parlementaire, sanctions plus efficaces de la FINMA, task force pour la protection des emplois, …) ont été rejetées ou renvoyées aux calendes grecques. Quelques postulats ont été adoptés – autrement dit, des mandats d’examen.

Une petite concession a été obtenue au Conseil des États : le Conseil fédéral aurait dû présenter une révision de la loi sur les banques. Le PS a alors appelé la ministre des Finances à prendre des engagements concrets – nous commençons à avoir l’habitude des promesses en l’air du camp bourgeois. Car la législation « Too big to fail » a de toute évidence failli. Cet engagement aurait été la condition du soutien du PS. Face à l’absence de position claire de la ministre, le PS a refusé définitivement les crédits.

Comme un léger goût d’hypocrisie

Après la crise du Credit Suisse, l’ensemble de l’échiquier politique suisse s’est répandu en déclarations sur la nécessité d’avoir des garde-fous plus stricts. Et lorsque l’occasion était là de renforcer enfin concrètement la réglementation bancaire, ces partis se sont tus ont refusé de soutenir les propositions qui auraient permis d’avancer rapidement.

Posons-nous la question. Qui fait de la récupération politique : le PS qui, depuis 15 ans, soutient une réglementation plus stricte, demande une session extraordinaire pour avancer enfin et, face au refus du bloc bourgeois, refuse « symboliquement » les crédits supplémentaires, ou bien le camp bourgeois, qui ne s’est pas gêné d’appeler à une meilleure régulation du secteur bancaire, mais a refusé d’agir concrètement lorsque l’occasion s’est présentée ?

On a pu entendre parler de l’irresponsabilité de la gauche. Il y a bien des irresponsables dans cette histoire. Les premiers sont les managers incompétents qui ont été incapables de prévenir la crise, et ont mis en danger des milliers d’emplois en Suisse. Les seconds sont les partis bourgeois qui, après se répandre en vœux pieux dans la presse, bloque toute règlementation plus stricte depuis des décennies.

 

Clément Borgeaud, Président du PSVr