Francine Zufferey est tombée dans la marmite syndicale à peine sortie de sa formation. Voilà 26 ans qu’elle s’active pour le syndicat Unia, soit plus de la moitié de sa vie ! Aujourd’hui, elle est secrétaire syndicale responsable du secteur du tertiaire pour le Valais.

Élue à la présidence de l’union syndicale valaisanne en octobre 2021, Francine Zufferey est la première femme à occuper ce poste en Valais. Elle s’est également engagée pour de nombreux combats égalitaires, notamment au Grand Conseil où elle a siégé 9 ans, soit 4 ans à la suppléance et 5 ans comme députée pour le district de Sierre.

Le Peuple.VS : Peux-tu nous expliquer quel est le rôle de l’USVs ?

Françine Zufferey : L’union syndicale valaisanne est l’organe valaisan de l’union syndicale suisse (USS), qui regroupe les 4 syndicats : Unia (issu de la fusion de la FTMH et du SIB en 2005), Syndicom (syndicat des médias et de la communication), le SEV (syndicat du personnel des transports) et le SSP (Syndicat des services publics).

En plus de l’organisation du 1er mai, nous prenons position lors de consultations de lois, faisons campagnes lors de votations fédérales et cantonales lorsque les objets impactent nos membres. La dernière en date, la réforme AVS21, a nécessité un très fort engagement de la part de tous les acteurs syndicaux.

Le Peuple.VS: en quoi consiste alors le mandat de la Présidente de l’USV ?

FZ : Il s’agit de mettre sur pied les rencontres entre les syndicats, de planifier les campagnes à venir, de définir les priorités et les défis à venir.  

Le Peuple.VS : Tu es également secrétaire syndicale auprès d’Unia. Quelle est la victoire remportée par le syndicat qui t’a le plus marquée ?

En mars 2010, nous avions lancé un référendum contre la révision de la loi sur la prévoyance professionnelle qui prévoyait une baisse du taux de conversion de la LPP de 6.8 % à 6.4%. Nous avons balayé cette loi injuste avec 72.7 % des votants en Suisse, à 80.9 % en Valais ! Avec un taux de conversion de 6,4% et un capital de prévoyance professionnelle de Fr. 100’000.-, une rente annuelle n’aurait représenté que Fr. 6’400.- au lieu de Fr. 6’800.- . Aujourd’hui, cette volonté du peuple n’est plus respectée car les taux de conversion baissent. La lutte pour une vie digne après des années de travail continue plus que jamais.  

Le Peuple.VS : Y a-t-il aussi des défaites, des regrets ?

FZ : évidemment, je ne peux que mentionner la courte défaite contre la révision de l’AVS ! Mais, je me félicite du résultat en Valais, c’est important de le souligner, la population valaisanne a rejeté cette révision avec 55 % de non. Quand on connaît les forces politiques en place dans notre Canton, on constate tout d’abord le rôle des militant·e·s sur le terrain et l’importance de s’allier lors de ces combats touchant la société ; notamment nos assurances sociales.

Le Peuple.VS : Quels sont les prochains combats syndicaux ?

Certains secteurs peinent à recruter (santé, mécanicien sur locomotive, hôtellerie…) car les conditions de travail se dégradent. Les entreprises doivent écouter les salarié·e·s qui s’épuisent à la tâche : stress, toujours plus de rendement, faire face aux absences … avec des conditions salariales qui ne suivent pas.  La santé au travail est un droit ! Ignorer ce problème se ressent par un manque de professionnels et représente un coût humain et social sur du long terme.

L’encadrement des nouvelles formes de travail telles que les plateformes numériques, le travail à domicile est un défi à relever. Tout comme veiller à ce que la conciliation entre vie privée et professionnelle soit mieux prise en compte.

Les Syndicats s’engageront pour un salaire minimum en Valais et encouragent leurs membres à se former tout au long de leur vie professionnelle. Il est de notre devoir de tout entreprendre pour diminuer le fossé immense qui sépare les riches et les pauvres dans notre pays.

Nous serons également très attentifs à la loi sur l’ouverture des magasins en Valais. Prétendre comme certains que tout le Canton du Valais est une zone touristique fait preuve d’une réelle volonté de durcir encore les conditions de travail dans le secteur de la vente…

Le Peuple.VS : Francine, comment vois-tu la société d’aujourd’hui ?

Nous sommes confrontés à une crise réelle. Si d’aucuns pensaient que la lutte des classes n’existait plus, notre époque nous rappelle à quel point celle-ci est réelle.

Nous assistons à une réelle volonté de démantèlement de nos assurances sociales. Toutes les conditions ont été durcies, par exemple dans l’assurance AI et l’assurance chômage. Et ce n’est là que le début. Dans de telles conditions, ce seront toujours les mêmes qui trinqueront !

Nous devrions être plus attentifs aux mouvements collectifs qui ne sont pas politisés, la rue ne prend pas de gants et met en lumière les problèmes.

J’aimerais parfois que la politique soit organisée autour d’une notion que j’affectionne : le bon sens. Je me réjouis particulièrement de l’arrivée de nombreuses et nombreux jeunes au sein des syndicats. La jeunesse est là pour bousculer nos certitudes, voire nos convictions, et c’est important de l’entendre.

Des membres des organisations syndicales se sont engagés fortement ces derniers mois contre AVS 21 et ceci a eu de l’impact sur les résultats de notre canton. Des combats s’annoncent dans des renouvellements de conventions collectives et par les temps difficiles, l’union du monde ouvrier sur le terrain est très importante.

L’Union fait la Force.