Fin août, Tamedia rendait publique sa volonté de fermer son centre d’impression de Bussigny (CIL), avec à la clé le licenciement de 63 employé·es. Cette simple nouvelle se retrouve noyée parmi une multitude d’annonces de charrettes prêtes à dégager de la vie active des troupes entières de salarié·es, et de plonger autant de familles dans l’angoisse et l’incertitude.
L’attaque frontale qu’a subie ces derniers mois le monde de l’édition et de la presse plombe une fois de plus un secteur déjà attaqué trop souvent par les ennemis de l’ouverture. Dans le désordre , la fermeture de Swissprinters, une des imprimeries majeures de Suisse, qui soit dit en passant a préféré utiliser désormais ses bâtiments à de l’immobilier de luxe plutôt qu’à employer ses presque 200 fidèles travailleur.s.es, pourtant croulant sous le travail, les trop nombreux licenciements de Ringier, mastodonte de l’édition en Suisse, sans oublier les dégraissages chez ESH Médias qui édite entre autres le Nouvelliste à Sion, liste non exhaustive, trahissent une situation malsaine.
Si la conjoncture, le COVID et la numérisation peuvent parfois expliquer ces dégraissages, l’avidité immorale d’actionnaires nantis est grande responsable de ces nombreux drames humains et de cet appauvrissement des vecteurs de diffusion de l’information et des opinions.
Pour Tamedia, aujourd’hui TX group, nous avons à faire à Bussigny à un centre qui tenait plus que bien la route. En 2023 ses bénéfices juteux dépassaient allègrement les 143 millions de CHF. Sauf que cela n’entrait plus dans son objectif de stratégie. Les actionnaires n’en avaient pas assez. Et peu importe si les 63 “dégâts collatéraux “ sont en grande partie âgé·és de plus de 50 ans avec 20 ou 30 ans d’ancienneté. Cerise sur le gâteau la direction a balayé les propositions des commissions du personnel et des syndicats. Dégagez, il n’y a rien à voir. D’ailleurs TX groupe a déjà annoncé la fermeture prochaine de son centre d’impression de Zurich, pour regrouper tous les jobs d’impression sur Berne.
Mais il y a un mais. Toutes ces entreprises et groupes que je viens de citer, font aujourd’hui ou le feront prochainement, monter, soit imprimer nombre de leurs publications à l’étranger. Sans vergogne. Imaginez vos beaux catalogues et magazines vantant la beauté de nos entreprises bien de chez nous, de nos montagnes et de nos mayens, totalement élaborés et fabriqués hors de nos frontières. C’est déjà d’actualité. Je lance un appel d’ailleurs, aux nombreuses sections politiques, en vue des prochaines élections, de montrer l’exemple et d’imprimer vos divers flyers et manifestes en Valais. Notre canton possède encore de nombreuses imprimeries qui sont à même d’effectuer tous vos travaux d’impressions de qualité avec des outils de pointe. Journaux, prospectus, dépliants, revues, livres. Il n’y a pas que les vins et les fromages qui méritent notre attention. Ces professionnel·es touchent des salaires suisses, comme nous toutes et tous.
Mais, pourtant, la planche ne cesse d’être savonnée par les chantres du “tout libéral”. Que ce soit au niveau des journalistes ou des techniciens (mise en page, graphistes, correcteurs imprimeurs) les Conventions collectives de travail ont toutes les peines du monde à évoluer positivement, ou carrément à survivre. Les entreprises dénoncent ou refusent l’application des CCT. Et les nombreuses fermetures d’entreprises impliquent la perte de très nombreux employé·es et de syndiqué·es. Sans compter la crainte qu’ont nombre de collaborateurs de se syndiquer et de figurer désormais sur la “liste rouge” de leur patron. Les CCT sont pourtant le garant du sérieux d’une entreprise.
Jean Pierre Bodrito
Président national comité de branche de l’Industrie graphique, Syndicom
Conseiller général à Sion